12 octobre 2024 Néphyla est encore et toujours au ponton du Monte real Club de Yates à Baiona, Espagne
Depuis le début de notre voyage, je me demande ce que je vais écrire à la fin. Un livre, destiné uniquement à nous deux avec les superbes photos de Florence ? Ou un livre pour nous deux avec du texte et des photos, une image copiée/collée des blogs ? Ou bien plutôt un livre plus élaboré, sorte de carnet de voyage où se mêlent photos, dessins, poésies, citations, cartes, textes choisis du blog et récits courts des moments forts de navigation ou de la vie à bord ? Ou encore un roman qui suit le cours de notre voyage en fil rouge mais ne raconterait pas notre vie mais celle d’un héros imaginaire ? J’ai commencé les quatre solutions. Celle du carnet de voyage est bien sûr la plus séduisante car elle est « fantasmatique » dans l’esprit des voyageurs. Mais un tour de l’Atlantique en voilier en couple n’est pas à proprement parlé une aventure, même si elle n’est aucunement une ballade du dimanche. La découverte du monde en croisière n’est pas banale, les photos et récits sont là pour le prouver mais cela mérite-t-il un livre ? J’ai tellement envie de laisser courir la plume et mon imagination. A ce jour, pas de vraie réponse tranchée. Laissons passer les jours et au moins finissons ce voyage, coincés que nous sommes aujourd’hui dans le port de Baiona. Le ponton nous a bien protégé cette nuit au passage de la tempête Kirk avec des vents de 60kt et des vagues inexistantes ici alors qu’en mer, le vent devait être plus fort et les vagues n’en parlons pas, les modèles météo les mesurent à plus de 8m… Bienheureux que nous sommes ici à l’abri. Patience.
Je me souviens des mots d’Anton et de Vesna, nos copains rencontrés à El Hierro, dernière petite île au sud des Canaries. Anton qui a déjà fait un tour du monde et demi répondait alors à mes questions sur la difficulté de passer le cap de Bonne Espérance au Sud de l’Afrique du Sud. Pour lui, aucune difficulté particulière impossible à gérer. La seule inconnue était la date du passage. Ils avaient navigué à l’abri le long de l’Afrique, de port en port, en cabotant dans cet océan indien si dangereux. Ils attendaient. Cela leur a pris trois semaines, trois semaines dans un port à regarder les fichiers météo. Un jour, les conditions étaient favorables, vent, courant et état de la mer, ils ont passé le cap comme une simple formalité. Les trois mots qu’il m’avait confiés à la table de ce petit restaurant étaient « patience, patience, patience ». Facile.
Ce tour dans l’océan nous aura permis de découvrir les 5 bars mythiques, sorte de quadrature du cercle de la voile atlantique.
Le « Café da Marina », le plus petit mais aussi le seul du coin, sur le port de Vila Baleira à Porto Santo, première petite île proche de Madère située sur le trajet des voyageurs depuis belle lurette, depuis Christophe Colomb, pour ne citer que lui. Au bar, il y a des cacahuètes, des olives, le wifi et la bière y coule à flot. Santé à Jean-Mi et Sandra, François, Véro, Eric, Sylvie, Patrick, Hugo, etc.
Le « Floating bar » à Mindelo, île de São Vincente au Capo Verde, endroit entre deux mondes, celui des locaux, pauvres dans le meilleur des cas, très pauvres dans l’immense majorité des cas et celui des voileux où se retrouvent capitaines, familles et équipages, équipiers en manque de bateau et bateaux en manque d’équipage. Au Floating bar, il y a des cacahuètes, des olives, le wifi, la bière y coule à flot et on y trouve aussi de la Caïpirinha. Santé à André, Sophie, Anton, Vesna, Thierry, Caroline, et des nouvelles venues, les trois petites sœurs...
Les « Mango bar » pour les pontons 1 à 3 et « Kokoarum » plus récent pour les pontons 5 à 9 au Marin en Martinique. Le Mango bar était le point de rencontre des années des premiers plaisanciers dans les années 70/80. J’ai vu des photos de la baie où il n’y avait que quelques rares bateaux à l’ancre là où aujourd’hui on en compte 2000 dans le port et les mouillages proches et plus 2000 au mouillage de Ste Anne. Heureusement, le Kokoarum et ses voisins assurent le job aux arrivées pour distribuer aux heureux traversiers le café, les cacahuètes, le wifi, la bière qui coule à flot et le duo Ti’punch – Planteur. Santé à Jean-Mi et Sandra, la bande des 4 de Mindelo, la moitié du « El Hierro Gang », Mohamed, les trois petites sœurs encore, etc.
Le « Pirate caribbeean » et le « Quai Ouest » à la Marina Bas du Fort, Pointe à Pitre, Guadeloupe. Le Pirate a du café, de la bière et du Wifi. Et devinez qui on y a retrouvé ? (pffff, encore !!) Les trois petites sœurs. Note de la rédaction : Aucune n’est petite et aucune n’est la sœur de l’autre, c’est juste un petit mot doux pour ces trois jeunes filles qui sont passées directement de la pouponnière au voilier Molécule transatlantique. Le Quai Ouest offre, en plus de la bière, du café, du wifi et autres cocktails et surtout des soirées Karaoké. C’était une première pour moi, le karaoké. Disons que j’ai préféré la glace à la mangue… LOL. Ah oui, autre particularité du Quai Ouest, le bateau amarré juste là, au bout du bar, a un nom connu des initiés, son capitaine aussi a un nom connu. Rien à voir avec une pouponnière comme Molécule, comprend qui peut. Santé à Mohamed, Eric et Sylvie, Akiloë, Manon et bien entendu les 3 sœurs.
Celui qui n’a fait que la traversée vers les Caraïbes n’a pas pu boire la bière la plus symbolique de tous les bistros de marins de l’Atlantique, j’ai nommé celle qu’on boit au « Peter Café Sport ». Au départ de la transat retour, depuis Gwada (la Guadeloupe), chacun te salue, te souhaite bon vent et te dit de boire une bière à sa santé chez Peter’s à Horta, île de Faial aux Açores. On en a bu, avec les photos de Tabarly et Chichester accrochées au mur. L’acte symbolique effectué, les temps changent et les bars aussi, le Peter’s étant bien trop touristique, nous nous sommes retrouvés entre marins au U Bar, émulation du Uship d’à côté, nous ne sommes pas des touristes ordinaires. Mes chevilles gonflées d’orgueil pouvaient à peine me soutenir… MDR. Santé à Mathias et Pauline et bien sûr aux équipières de Néphyla, Manon et Akiloë, aux trois petites sœurs de Molécule encore et toujours.
Nous sommes partis il y a un an et demi avec une belle envie mais peu d’expérience. Florence et moi n’avons jusque-là jamais passé une nuit entière en mer, même si nous savons gérer un bateau. Notre première nuit a été une réelle découverte, celle des orages sur notre tribord que nous avons longé pendant plusieurs heures. Bonne occasion de se former à l’utilisation du radar qui nous indique le cœur de l’événement. La pluie, nous trempe et nous apprenons à nos dépend le fameux adage des 4 F :
Faim, Froid, Fatigue et Frousse. Nous n’avons pas beaucoup mangé, trop occupé à regarder ailleurs, nous avons eu froid, nos habits mouillés par les averses orageuses, nous sommes fatigués des derniers mois et semaines passés à vider et vendre la maison, trop occupés ailleurs et finalement sans doute impressionnés par toutes ces premières, la frousse a du pointer son nez au fond de notre ventre. Notre méthode a été de vider nos ventres pour éliminer au moins un F… LOL. L’équipe « vomito » va-t-elle réellement faire le tour de l’Atlantique avec une si « piteuse » première navigation ? Nous avons heureusement pu nous refaire une santé et un moral joyeux grâce à une deuxième journée et une merveilleuse nuit calme, accompagnés de trios de dauphins. A l’arrivée à Gijon, nous revenons sur cette première étape et nous rencontrons d’autres équipages qui nous racontent leurs faits d’armes les plus glorieux mais aussi leurs difficultés face à la mer, face aux pannes, aux sautes de vent, au mal de mer. Nous concluons tout ça par un mot qui devra nous accompagner durant notre formation de croisiéristes hauturiers : Nous avons le temps de grandir avant nos prochaines nuits en mer, patience. Aux fameux 4 F qui rendent malade certains ajoutent malignement un cinquième qui serait la Foif. D’après mes sources, ce serait une blague bretonne…
On nous avait pourtant prévenus, mais nous n’y avions pas cru. On nous l’avait dit et nous l’espérions chacun secrètement de notre côté sans se l’avouer. On nous avait dit que cela allait changer notre manière de vivre… Et bien c’était vrai ! Ce tour de l’atlantique aura été le moment le plus alcoolisé de toute notre vie d’adulte. Les 4 petits verres bus dans ces bistros pourtant célèbres n’ont été que les simples amuse-gueules au regard des dosages pantagruéliques de nos apéritifs maritimes. La poésie ne suffirait pas à décrire l’ambiance vaporeuse où la part des anges des dizaines de rhumeries caribéennes semble avoir été collectée par les nues et distillée pour remplir nos chopes désespérément vides tant notre gosier était en pente. Des couchers de soleils plus nombreux que les jours étaient nos excuses, des nuits entières à regarder les étoiles notre ligne de défense face aux reproches de notre bienséance passée. Comment résister aux injonctions diaboliques des boissons aux noms exotiques, des breuvages inventés aux recettes aussitôt oubliées. La FOIF, les bretons nous l’avait bien dit, le pire dans un navire, c’est la FOIF !! OUF. Nous n’avons pas été noyés par tous ces liquides mais nous ne sommes pas encore arrivés, l’apéro de fin pourrait être terrible. Patience !
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Le Comité de course, le Chef du nouveau gouvernement et l’Amirauté annoncent officiellement ouverte la petite fenêtre météo de Baiona vers La Rochelle. Etant donné les restrictions budgétaires décidées au dernier conseil des ministres, la petite fenêtre a été remplacé par un « mini-vasistas », selon la formulation du rapporteur. Départ dimanche 13 octobre à 09h00 de Baiona. Le largage des amarres se fera par l’équipage de Rackam, Frank et Florence à bord du feeling 1090 du ponton 58 des Minimes. Comme Néphyla, vieux copains de pontons devenus collègues de transat, ils partent, nous finissons, ainsi va la vie et comme ils déclament à chaque fin de leur vidéo : « Vaille que vaille ».
Florence leur a confié un petit caillou (en photo dans ses mains) qui voyage tout seul au fond des cales de navires. Il a déjà fait plusieurs tours, dont un atlantique. Elle n'est pas belle la vie quand on est un caillou ?
ETA estimée le 17 au soir ou le 18 au matin. Cornandieu de Puisangrin, demain, on joue au golfe, ça va swinguer.
P&F
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